Le 30, cette fois, on ferme

Publié le par Vincent Mahey

P1050935.JPGPour la cérémonie de clôture officielle, Aziz Ndieng a passé quelques coups de fil et il tente de nous faire croire qu'il a monté le super étoile de Dakar version Fesman. Ça va se passer autour de notre copain Abib Fail, le bassiste de Youssou qui est bien tout-terrain pour diriger un tel chantier. Il nous annonce d'abord Lokua Kanza, Youssou lui-même, Ismael Lo et quelques autres chanteurs pour un "We are the world" de circonstance.

J'arrive de bonne heure à la Renaissance pour accueillir les gens du protocole avec Aziz Sow, le ministre du Fesman. Aziz, avec Abdou et Sindiely, est le 3ème opérateur du festival. La face visible, médiatisée. Nous nous sommes peu croisés jusque-là et je me demandais justement si nous aurions l'occasion un jour. Le protocole est bien en retard et c'est donc notre occasion de tchatcher comme des commères. Aziz me confirme que tout ça a tenu à peu de choses, sur peu de gens. Je comprends que son occupation essentielle cette dernière semaine a été d'acheminer des sacs de liasses pour payer d'urgence ce qui devait l'être. Il y va avec confiance de quelques anecdotes croustillantes sur où et comment trouver des millions en un instant ! C'est comme dans les films !

Les gardes du corps et autres chefs de protocole finissent par arriver pour régler les détails de la cérémonie. Ce sera vers 17 heures et on nous fera livrer le pupitre présidentiel et quelques fauteuils de luxe en plus. Vers 14 heures commence à s'installer autour de Abib la plus belle fête du slip qu'on puisse imaginer. Des batteurs, des percussionnistes, des cuivres, des claviers, des pianistes, des guitaristes, des bassistes, des violonistes exotiques, des choristes d'opérette, des vibraphonistes pour faire joli. Un bordel sans nom qui nous fait vite décider de renoncer à mettre de l'ordre. Axel truffe le plateau de micros et advienne que pourra. Pascal Lokua s'effraie assez vite de la chose et nous quitte sans un au revoir avant le début des hostilités, Ismael et Youssou n'ont même pas pris la peine de se déplacer. Je dis à Aziz : "Mon frère, c'est pas un cadeau ton affaire".

Abib hausse les épaules et on se dit tous les 3 que c'est juste un mauvais moment à passer. Tout le monde est en place vers 17 heures mais ça ne se bouscule pas encore au portillon.

Vers 18 heures, les petits enfants en costume traditionnel ont les pieds qui chauffent à force d'attendre le président. P1060082.JPGLes djembe et sabars assurent le tempo, en petit nombre. Ça fait un peu ploc ploc. Au premier rang s'est installé l'intégralité des membres du gouvernement, le président du sénat et une P1060087.JPGbardée de dignitaires avec de jolis bonnets rouges. Il y a aussi les casquettes des généraux.

Aziz est comme moi, un peu dans ses petits souliers. Le médecin colonel Boubou Mboup vient me faire la conversation pour P1060103.JPGme décontracter. Vers 18 H 45, les sabars rentrent en grève et les enfants s'assoient, les dignitaires baillent et on laisse rentrer en petites doses quelques représentants d'un peuple bien sage pour finir de garnir nos gradins. Vers 19 heures enfin, la ronde des sirènes annonce l'arrivée imminente du chef de l'état. Les sabars reprennent du poil de la bête et le chef du protocole ne tarde pas à lancer un "Monsieur le président de la République" rendu moins solennel par le joli larsen qu'il provoque en passant à 30 cm devant le système Uniline.

M. Wade succombe alors à un petit peu de mise en scène en gravissant une dizaine de marches vers ses géants. Plutôt alerte pour un presque centenaire ! Quoique le haut du buste paraisse un peu raidasse. Une jolie lumière blanche rasante projette son ombre sur l'escalier immense. Il prend la pause, l'index pointé dans la direction opposée de celle indiquée par la statue ???!!! Une jolie mise en abîme à la symbolique pas facile à décrypter.

L'orchestre de Abib entame ses chansonnettes après quelques mots de bienvenue des 2 Aziz. Ça s'est bien calmé depuis la foire d'empoigne de l'après-midi. Tous les musiciens semblent avoir pris la mesure de l'événement et la horde sauvage se change miraculeusement en orchestre pour thé dansant. PARFAIT. 4 chanteurs et chanteuses totalement inintéressants plus tard et voilà le moment des discours. M. le président de l'Union Africaine y va de ses félicitations au Sénégal et invoque les anciens Senghor et Césair, appelle à l'unité.

On m'a dit que le président Wade avait une toute petite voix. Pour la premiere fois depuis le début du festival, j'ai le trac. Le calage de micro de tous les dangers !! En dehors du site, la pollution sonore est assez grande. 1/2 phrase et je sais que c'est bon, on finira le festival sans aucun bémol avec le son. M. Wade remercie les opérateurs du Fesman, s'enorgueillit d'une réussite totale, accepte de devenir le parrain du festival et le garant de sa vie future, déclare que Dakar est déjà prête s'il n'y a pas d'autres villes candidates pour la prochaine édition qu'il souhaite dans trois ans. Il P1050993.JPGrenouvelle un appel solennel à l'unité et dit sa foi dans la création prochaine des Nations Unies d'Afrique.

Sur tous les sièges de notre "auditorium", il a fait déposer son hymne à la renaissance africaine, écrit pour l'occasion :

 

Surgis de nos campagnes 

Des villes et des faubourgs 

A l'appel de la patrie

Voici les Africains

 

Refrain

Africains ! Africains ! (bis)

Combattants de la liberté

Africains ! Africains ! (bis)

En avant ! En avant ! En avant !

 

De la mer à la campagne

La savane et la forêt

A l'appel de mère Afrique,

Voici les Africains

 

Refrain

Africains ! Africains ! (bis)

Combattants de la liberté

Africains ! Africains ! (bis)

En avant ! En avant ! En avant !

 

Garçons et jeunes filles,

Ouvriers et paysans,

Accourons sauver l'Afrique

Voici les Africains

 

Les applaudissements sont aussi nourris que possible pour un parterre de notables encravatés. Au fond de l'enceinte se trouvent aussi là quelques femmes pas exactement fondues dans l'atmosphère. Finalement, au moment où M. le Président descend de notre scène, elles brandissent de petits mégaphones et entament leurs chansons partisanes. Je comprends facilement qu'il s'agit de 2012.

Randy Weston arrive à point nommé pour donner les notes finales. De bon ton et bon goût pour clore cette cérémonie finalement très modeste. Ça nous paie notre journée et le piano de FX sonne énorme sous les doigts du gentle giant. On se paie le balai des sirènes une dernière fois et voilà que, subitement, tout est déjà derrière nous. La nuit est noire et fraîche, parfaite pour un bon gros démontage.

Publié dans Sur place

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